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26 janvier 2020 7 26 /01 /janvier /2020 18:43
l'école des enfants fantômes

     

 

     

L’école des enfants fantômes,

 

Je m’appelle Janik. Un visage triangulaire. Les cheveux châtains et mi-longs. Je porte une robe d’écolière à col blanc. Elle est bleue. Je ne me souviens pas de mes parents sans doute parce que je suis morte et je suis à l’école des enfants fantômes. Ma maitresse est la fée babouchka. Elle est aussi notre maman et nous dormons à l’école. Ambra la chatte rousse est assise sur le bureau de l’institutrice et elle fait sa toilette. Nous sommes sept enfants dans cette classe. Nos bureaux en bois sont disposés en étoile : une étoile à sept branches. L’encre dans nos encriers est bleu-nuit, légèrement pailleté. Par la fenêtre : la nuit et les flocons de neige. La fée Babouchka allume le poil mais je suis toujours frisson. J’ai terriblement froid. Elle écrit la leçon à la craie sur le tableau noir. Nous recopions dans nos petits cahiers. En faisant attention à ne pas faire une tache d’encre. Le buvard absorbe ce qui est à flot. De nos casiers nous sortons nos livres de lecture, et on lit dans notre tête puis à voix haute lorsque la maîtresse nous a désigné. La sphère, notre terre, tourne lors d’un courant d’air. Nous sommes minuscules, quelque part. A peine des fourmis. Invisibles.

La fée Babouchka nous emmène parfois en forêt pour étudier les sciences naturelles où faire des courses d’orientation. La fée Babouchka nous apprend des chansons et des poésies. Nous chantons sur une scène en bois à la fin de l’année. Les rideaux pourpres de la scène ondulent comme la robe de Marylin Monroe. Les planches craquent comme une forêt en proie à la tempête. C’est un spectacle entre nous et nous nous sommes déguisés. Je suis déguisée en fée bleu. Babouchka coiffe mes cheveux et me maquille les yeux avec du khôl bleu. Babouchka à de longs cheveux noirs ondulés. Elle porte une longue robe à roses rouge. On dirait une fille des magazines tant elle est belle. Elle porte une odeur de cigarette et de parfum floral. Elle a une voix douce. Elle n’a pas besoin d’hausser le ton, les élèves l’aiment beaucoup et sont sages.

La cour de récréation est recouverte d’un manteau de neige, les enfants ont fait un bonhomme de neige. Sous le préau nous avons dessinés une marelle. Margueritte ma copine aux longs cheveux blonds fait tournoyer trois cerceaux autour de sa taille. Estelle une petite fille rousse fait de la balançoire. Le portique en fer forgé grince, moi je n’ose pas m’approcher.  Benjamin le petit brun  fait du toboggan. Lorsque la fée Babouchka fait tinter la cloche nous accrochons nos vestes, nos bonnets, nos gants et nos écharpes sur les portes manteaux dans le couloir. Chacun en a un avec son prénom inscrit dessus, sur une étiquette collée. Le mercredi est ma journée préférée. Nous faisons des puzzles ou du coloriage. La maitresse nous lit un conte. Nous dessinons et nous chantons.  A la cuisine de l’école nous faisons un gâteau ou des crêpes. Des crêpes au chocolat. Nous sommes semblables aux autres enfants. Nous n’avons pas besoin de manger mais nous sommes restés gourmands.  

Nos chambres sont à l’étage. Je partage ma chambre avec Margueritte. Nous avons un lit en hauteur, je dors sur le lit du haut... Je dors avec un ours bleu. Tandis que Margueritte dort avec sa poupée qui lui ressemble : blonde, longs cheveux. Cette chambre est tapissée de violettes. Une lampe à pétrole est posée sur la table de chevet. Nous avons un bureau d’écolier en bois. J’écris dans mon journal intime : sa couverture est rose ivoire. Je le cache dans le tiroir secret de ma  boite à musique. Par la fenêtre, les flocons de neige.  Au fond du couloir : la salle de bain. Avec sept petits lavabos bleus à hauteur d’enfant. Chacun de nous à sa savonnière. Sa brosse à dent. Son petit verre. Et sa serviette. Il y a aussi une baignoire. Avant de dormir la fée vient border tous les enfants. Elle nous lit une histoire.

Une nuit je ne me suis pas endormie car je sais que Babouchka ne dort pas ici et elle ne dort peut-être pas. Je n’aime pas nous savoir seule car l’école est située à côté des bois. Elle a une chambre. Elle se fait belle devant sa coiffeuse. Elle se brosse longuement les cheveux. Une malle est ouverte sur son lit, elle y range ses toilettes et un grimoire.  Un beau carrosse argenté l’attend en bas. Je me suis glissée dans sa malle, parmi ses robes. Un château agrippé à un duc rocheux. Le carrosse est entré dans la cours du château. Un chevalier lui a ouvert la portière. Elle descend et l’embrasse sur la bouche.  J’ai peut-être rêvé parce que je me suis réveillée dans mon lit, à l’école.

L’école est propre et rangé parce que Baboucka fait un enchantement en utilisant sa baguette, elle le fait avant que nous allions en classe et le soir au moment de nous endormir. Quand l’école est finie nous retrouvons nos chambres propres et rangés, les meubles sentent la cire d’abeille, les lits sont faits. Lorsque nous allons dans la salle de bain, les lavabos, les miroirs, et la baignoire scintillent et une senteur de lavande flotte.

En ce moment je commence à me poser beaucoup de questions. D’où je viens ? Qui sont mes parents ? Quelle est mon histoire ? Comment suis-je morte ? Allons-nous rester des enfants pour toujours ? Depuis combien de temps sommes nous ici ? Cela fait une éternité…J’aimerais découvrir le monde. Ce n’est pas marrant d’apprendre ses leçons pour toujours. Je me demande à quoi cela va nous servir puis-ce que nous sommes morts ? Cela n’a pas de sens.

Mon ours est bleu, il a les yeux ronds et bleus. Il porte une salopette et un pull. Dans sa poche gauche il y a une libellule avec une chaine. Cette libellule m’intrigue. Le ventre de la libellule s’est ouvert, j’ai déplié une clef comme la lame d’un couteau suisse. J’ignorais que ce pendentif cache une clef. Mais je me demande ce qu’elle ouvre ? Pendant longtemps je n’ai pas su.

Babouchka nous a emmenés en voyage. On a marché jusqu’à la gare au-delà la forêt. On est monté dans le train. Le train flottait dans l’espace. On dormait dans les couchettes du train. On est descendu à une station balnéaire. Enfin il faisait jour et il ne neigeait plus. Du soleil qui m’éblouissait un peu et réchauffait mes os. Un peu de vent. Les cris des mouettes. La mer bleue. Le sable fin, les coquillages sur la plage. Un petit port de plaisance. Babouchka avait réservé des chambres à l’hôtel de la plage. Les chambres étaient bleues et les loquets en forme de coquillage. Des hublots donnaient sur la mer. J’ai ouvert ma petite valise, je retrouvais mon ours bleu, la libellule dans la poche de sa salopette, mon journal intime mais aussi  une serviette de plage, un maillot de bain, une robe d’été blanche à rayure bleu, une brosse et un petit miroir. Le matin au levé : un petit chocolat. Des balades sur la plage. Cueillir des coquillages. Oter ma robe bleue et aller se baigner.  A midi manger des fruits de mer. L’hôtel était tenu par un jeune couple. J’avais la sensation de les connaitre et ils me souriaient. J’ai surprise la dame en train de pleurer assise dans les escaliers. Je lui ai demandé si je peux la câliner ? Elle a dit oui alors je me suis blottie contre elle. Plus tard je l’ai entendu crier, son époux l’insultait. Je me suis demandé s’il n’allait pas lui faire du mal ?! C’était étrange cette sensation de déjà vu.

Margueritte semblait lointaine de moi, je l’apercevais jouer sur la plage avec les autres enfants. Je me sentais livré à moi-même.    

Dans ma chambre une moustiquaire me protégeait. Ma chambre flottait sur l’eau comme un bateau. La nuit se confondait à l’océan. Les étoiles se reflétaient sur l’eau. Seule au milieu de la nuit je réalisais  que mes camarades ne me parlent pas, du moins pas avec les mots, et nous n’entrons pas vraiment en communication. Nous semblons jouer ensemble mais c’est pour faire semblant. On joue une scène de la vie humaine, ordinaire…J’étais de plus en plus seule au milieu de l’espace. De plus en plus vide. J’ouvrais la porte de ma chambre. De l’eau à mon seuil. Il n y avait plus de couloir et les autres chambres s’étaient détachées de la mienne comme les wagons d’un train. En transparence de l’eau j’ai vu un escalier. Je suis descendue sous les eaux. Une voix m’appelait « Janick ». C’était une chambre, la même chambre : une jeune fille songeuse allongée sur son lit, elle me ressemblait. « De quoi es-tu morte ? » Elle ne répondait pas car elle ne me voyait pas. Cette chambre ressemblait vraiment à ma chambre d’hôtel avec la moustiquaire autour du lit. Sur la table de chevet il y avait un miroir ovale avec une libellule dessinée dessus. Je ne pouvais pas l’ouvrir. Il y avait une serrure miniature. J’ai pensé à ma libellule et j’ai introduis la clef. Un portrait ovale tomba sur le plancher. Elle était dans le miroir. Un couple : une femme et un homme face à face. La femme portait un voile de marié et l’homme était en costume. Ils se regardaient amoureusement.  C’est probablement les parents de Janick. Une scène se dessina sur le miroir ovale. Janick faisait de la balançoire dans la cours de l’école. Il neigeait. La petite avait froid mais elle s’envolait dans le ciel, en pliant et dépliant ses jambes, en s’élançant. Au dessus des bois, elle apercevait la mer. Elle fît une chute mortelle. Comme un oiseau tombé du nid.

La fée Babouchka ramena Janick à l’école. La neige toujours la neige ! Mais cette fois ci, il faisait jour ! Ses camarades n’étaient plus là. Janik réclama son amie Margueritte et la chercha mais en vain. La fée lui dit qu’elle est morte. Elle réclama ses parents. Elle attendait devant le portail, Ambra venait se frotter à ses chevilles et comme ils tardaient à venir et que la nuit allait tomber, elle s’aventurera dans la forêt où elle découvrit une tombe au milieu de fougères : Janick 1932-1939 était gravée sur la pierre tombale.  Ambra miaula d’une petite voix plaintive. La fée Babouchka était derrière elle, elle s’approcha d’elle doucement et elle l’a serra dans ses bras.

« Tu n’arrivais pas à apprendre à lire et on ne savait pas trop pourquoi car tu semblais intelligente. Tes parents travaillaient à l’hôtel de la plage. Un jour ta mère Marine n’est pas venue te chercher à l’école parce qu’elle était malade. Elle ne mangeait plus parce qu’elle avait beaucoup de chagrin, ton père Hugues ne l’aimait plus et il n’était pas gentil avec elle…Personne n’est venu te chercher. Alors tu es allée faire de la balançoire et puis tu es tombée parce que tu étais faible. Tu étais trop peu couverte : Ce matin de décembre 1939, ta mère n’était en état de te  préparer pour aller à l’école. Tu ne comprenais pas bien la situation, on ne t’expliquait rien mais tu avais une terrible sensation qui flottait en toi : une angoisse. Ce jour là, la maîtresse t’avait prêté un châle mais le soir après l’école tu attendais, tu attendais ta maman. Le châle a glissé de tes épaules et l’angoisse était plus importante que le froid. Tu as fait de la balançoire pour te distraire de l’angoisse, de plus en plus haut, alors que la nuit se levait et tu as chuté. »

Janick sanglota. Ambra se frottait contre elle, en ronronnant, puis la chatte emprunta un sentier dans la forêt, la fillette se releva et suivit l’animal qui semblait l’attendre. La neige tourbillonnait. Janick descendit dans la terre parmi les feuilles mortes, elle s’enfonçait dans la terre et elle était absorbait, elle s’étouffait en avalant de la terre, c’était une sensation douloureuse mais une autre elle, semblait au contraire  s’élever dans les cieux : elle était projetait. 

Elle était dans le carrosse à côté de la fée Babouchka et en haut du chemin de la montagne, Janick apercevait par la fenêtre : un château. Le chevalier que Janick avait vu en rêve l’attendait devant le portail du château et il embrassa la fée Babouchka. Il avait de longs cheveux noirs. Le chevalier salua Janick. Lui et la fée l’accompagnèrent dans ses nouveaux appartements et la laissèrent seule.  Janick avait une chambre dans le ciel avec un feu de cheminé. Ambra était couchée sur son lit à baldaquin. Dans Le miroir de la coiffeuse elle vît qu’elle avait grandi : ses cheveux étaient plus longs, son visage plus rond et apaisé, sa taille était très fine et elle avait une petite poitrine. Elle n’avait plus sept ans. Son cou était fin et elle portait une libellule en pendentif.        

     

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